Ignorer et passer au contenu
Café lavé à Antigua

Café lavé à Antigua

Café lavé à Antigua

J’ai récemment eu la chance d’aller au Guatemala pour un field trip dans la région d’Antigua. Étant dans l’industrie depuis une bonne dizaine d’années, je savais déjà à quel point il y a du travail en amont de chaque tasse de café de spécialités servies. Mais le voir de mes yeux, parler aux gens qui y travaillent, constater les défis auxquels ils sont confrontés, voir les enjeux économiques ou sociaux derrière la production de notre boisson préférée… Quel choc! Voici un petit billet pour partager avec vous une infime partie de cette chaine de travail qui mobilise un énorme potentiel écologique, économique et humain. Il sera question ici du traitement du grain après la récolte.

Le mucilage qui entoure le grain de café et la pelure du fruit

Saviez-vous qu'une fois les fruits de café récoltés, il faut en extraire les grains qui sont enveloppés dans différentes couches organiques (endocarpe) qui servent principalement à protéger le grain et à le nourrir lors de la germination. Il est absolument indispensable de procéder à cette extraction et au séchage rapidement après la récolte sans quoi les grains fermentent et pourrissent. Pour ce faire, il existe plusieurs façons de procéder. Les deux plus connues sont par voix humide dite lavée ou par voix sèche dite naturelle. Il sera question ici principalement de la méthode lavée.

Cuves de fermentation

Par voix humide, les cerises fraichement récoltées sont convoyées vers la machine à dépulper en cheminant par un système de siphon hydraulique. Cette étape cruciale permet de faire un premier tri en rassemblant les grains de même densité qui flottent en strate et aussi d'éliminer roches et brindilles qui peut se retrouver dans le café. Une fois dans la machine à dépulper, le grain est extrait mécaniquement de l’endocarpe (littéralement la pelure), les grains passent dans une paire de rouleaux soigneusement ajustés pour ne pas abimer les grains et sont littéralement expulsés du fruit par la pression. Ensuite les grains sont mis dans de grandes cuves d'eau pendant 12 à 48 heures. Cette opération permet une décomposition microbienne du mucilage, la chaire du fruit. Une fois cette opération accomplie, le café est acheminé par canaux remplis d’eau vers les patios de séchage. Étendu sur le sol ou sur des treillis surélevés, le café  est régulièrement retourné manuellement pour assurer un séchage uniforme. Une fois séchée, il faut retirer le grain vert de la parche, une sous-couche qui protège le grain. La parche est éléminée mécaniquement dans une machine qui brosse le café. Par la suite, l’entièreté de la production passe sur des tables à vibrations inclinées qui permettent un deuxième tri. Les grains plus lourds donc plus denses se retrouvent du côté surélevé de la table alors que les grains plus légers et les impuretés se retrouvent du côté bas. Les grains sont ensuite convoyés dans une machine très sophistiquée qui tri grain par grain. Cette machine rejette tout grain qui n’est pas conforme aux exigences en termes de forme, couleur ou grosseur. Une fois ce troisième tri terminé, le café est transféré par convoyeur à soufflerie, dans des silos dans lesquels il sera prélevé pour être mis en poches de jutes pour être expédié aux quatre coins de la planète. 

Le café sur patio doit être retourné régulièrement  pour éviter la fermentation

La méthode sèche, ou dite naturelle (qui fera l’objet d’un futur article) est quand elle beaucoup plus simple. En gros, une fois le fruit récolté, il est mis à sécher immédiatement en entier. Les grains passent ensuite dans une première série de rouleaux pour retirer l'endocarpe et finalement dans une deuxième paire de rouleaux pour le polir et en décoller la parche. Pour ensuite suivre sensiblement le même chemin que le café lavé. 

Historiquement le choix d'une méthode ou de l'autre reposait principalement sur l'accès en eau de la région productrice ainsi qu'à l'accès en infrastructures. C'est pourquoi on retrouvait beaucoup de café traité par voix sèche provenant d'Éthiopie ou du Yémen par exemple où les pluies sont plus rares et où le manque de ressource limite le développement de mécanisme de production.

Aujourd'hui, les producteurs peuvent choisir l'une ou l'autre des méthodes en fonction de ce qu'ils estiment le meilleur choix pour produire un café unique au profil recherché.

En effet la méthode de traitement a un impact majeur sur le goût du produit final. Les cafés lavés, très appréciés dans l'industrie à cause de leur stabilité, présentent des arômes plus subtils, délicats et équilibrés. Les cafés naturels pour leur part ont longtemps été boudés à cause de leur caractère imprévisible, mais sont maintenant mis en valeur et sont très appréciés par l'industrie du café de spécialité (et par votre auteur) pour leur profil unique, leurs arômes plus affirmés, robustes, explosifs, très fruitée et souvent sur fond de vinification.

 

D'autres considérations éthiques relatives aux méthodes de traitement sont actuellement sujet de débat au sein de l'industrie. Notamment à cause de la question de la gestion de l'eau et de l'impact du rejet de l'eau usée dans l'environnement, pour ne nommer que ceux-là.

Finalement, naturel ou lavé? À vous de choisir. Soyez curieux, demandez conseil, soyez exigeant. Après tout, vous en consommez à tous les jours!

Simon Fabi
Copropriétaire  chez Brulerie de Café de Québec et Brulerie Faro

Article précédent
Article suivant

Laissez un commentaire

Veuillez noter que les commentaires doivent être approvés avant d'être affichés

Panier

Votre panier est vide

Boutique